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Archive for the ‘Carnet nuit’ Category

Un roman de Jo Walton, publié dans la collection Lunes d’encre chez Denoël.

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Présentation de l’éditeur :

Née en 1926, Patricia Cowan finit ses jours dans une maison de retraite. Très âgée, très confuse, elle se souvient de ses deux vies. Dans l’une de ces existences, elle a épousé Mark, avec qui elle avait partagé une liaison épistolaire et platonique, un homme qui n’a pas tardé à montrer son véritable visage. Dans son autre vie, elle a enchaîné les succès professionnels, a rencontré Béatrice et a vécu heureuse avec cette dernière pendant plusieurs décennies. Dans chacune de ces vies, elle a eu des enfants. Elle les aime tous… Mais lesquels sont ses vrais enfants : ceux de l’âge nucléaire ou ceux de l’âge du progrès ? Car Patricia ne se souvient pas seulement de ses vies distinctes, elle se souvient de deux mondes où l’Histoire a bifurqué en même temps que son histoire personnelle.

Patricia vit en maison de retraite, elle a 88 ou 89 ans, elle ne sait plus trop. Il faut dire qu’elle est un peu confuse, ses souvenirs se mélangent… D’un jour à l’autre, les choses lui semblent différentes, sa chambre, le personnel soignant… mais aussi le passé. Pour ce qui est de sa petite enfance, sa mémoire lui paraît intacte et linéaire, elle nous conte ses parents et son adolescence, ses études et la guerre… Mais quand arrive un choix important à l’orée de sa vingtaine, son existence semble se dédoubler. Dès lors, les chapitres et les situations s’alternent selon qu’elle a répondu « maintenant » ou « jamais » à la question fatidique.
J’ai aimé cette alternance et ces chapitres ni trop longs ni trop courts. Cela donne du rythme. Le contraste entre ces deux vies n’en est que plus flagrant, les subtilités du récit plus appréciables.
Jo Walton nous conte ces deux vies en parallèle, de l’enfance à la vieillesse. Elle donne peu à peu corps à cette femme dans tous les aspects de sa personnalité et de ses potentialités. Sous nos yeux, Patricia subit de nombreuses métamorphoses, les grandes lignes de sa vie étant toujours associées à un diminutif particulier. On la voit tour à tour frustrée ou épanouie, solitaire ou entourée, femme au foyer ou enseignante, mère et amante. Ces deux existences forment le Yin et le Yang, chacune porte en elle le germe de l’autre. Les deux m’ont plu, et c’est de leur mise en regard que naît tout l’intérêt, mais comme tout le monde j’avais ma préférée.
Jo Walton sait raconter le quotidien sans que cela devienne ennuyeux, elle en peint une fresque tout en clair-obscur. Patricia est un personnage formidable, quelle que soit la vie dans laquelle on la suit. C’est toujours la même femme, cohérente malgré les aléas, et on l’aime dans ses deux vies. J’ai ressenti une grande empathie à son égard, j’avais envie de l’aider et de la réconforter dans les moments difficiles et c’est en cela que réside le talent de Jo Walton : elle rend ses personnages véritablement vivants.
Les chapitres se font écho, la vie de Patricia avec Mark, sa vie sans lui, des épreuves et des joies, des faits inchangés parfois mais globalement deux vies très différentes, bien remplies, entre la maternité, la recherche du bonheur pour soi mais aussi l’envie de rendre le monde meilleur et plus sûr. Les personnages se croisent ou vivent des destins communs. Le tout rend compte de la complexité de l’existence et de ses ramifications. L’auteur a tissé un ouvrage d’une grande finesse avec un sens du détail qui force l’admiration.
En compagnie de Patricia, on vit près d’un siècle d’humanité, de luttes, de progrès, d’injustices, tous les conflits du XXe siècle et leurs possibles évolutions. Peu à peu, l’uchronie mondiale rejoint l’uchronie personnelle. Les variations s’élargissent comme par ricochet. Or, si l’un de ces mondes va vers un avenir plus radieux, ce n’est pas le cas du second. Et si nous avions gagné certains combats au détriment d’autres ?
Ce roman pose de nombreuses questions et cela dans tous les domaines. Il propose notamment une réflexion sur la lutte pour les droits des femmes ainsi que des homosexuels en tant qu’individus, mais également en tant que couples et familles. Nous nous retrouvons face à des situations aberrantes comme une femme devant renoncer à son métier parce qu’elle se marie, alors qu’en parallèle, en travaillant, elle n’aurait pas pu obtenir de prêt en étant célibataire… Les iniquités du quotidien nous sont décrites sans fard, comme par exemple une femme à qui on refuse le droit de voir sa compagne hospitalisée parce qu’elle n’est pas considérée comme un membre de sa famille…
Walton évoque de nombreux sujets, avec mise en situation, comme la contraception, les pressions psychologiques, le féminisme, le nucléaire, la vieillesse… Elle constate, ancre son propos dans le réel, sans faire la morale. Elle montre juste comment cela pourrait évoluer et donne aux gens l’occasion de se faire leur point de vue sur des sujets auxquels ils n’ont pas forcément réfléchi, que ce soit parce que ça ne les concerne pas directement, parce qu’ils n’ont pas conscience de certains faits ou que ces combats ont été gagnés et que l’on ne se rend pas forcément compte de leur valeur aujourd’hui.
Walton décrit également tout ce que l’on ne veut pas voir, comme la vieillesse et ses misères, la grande cruauté dont on peut faire preuve parfois sans en avoir conscience. Elle ne cherche ni à choquer ni à accuser, juste à montrer les choses dans leur vérité crue.
Mes Vrais Enfants est un récit intelligent, d’une grande profondeur, une uchronie complexe et émouvante. Walton a su créer une personne qui semble réelle et ce de sa petite enfance jusqu’à sa grande vieillesse. Deux fois. Et je ne parle pas de la galerie de personnages qui l’accompagnent. En fermant le livre, j’avais l’impression de quitter des amis. Elle m’a également fourni de nombreuses pistes de réflexion.
La fin était attendue et me semble cohérente. Je reprocherais juste à l’auteur de l’avoir un peu trop expliquée à mon goût. J’aime que l’on fasse confiance à mon intelligence, ceci dit je comprends aussi ce qui l’a poussée à clarifier son propos.
Ce roman est ambivalent, dans sa nature comme dans son récit. On pourrait le classer autant en fantastique qu’en science-fiction spéculative. Walton a fait preuve d’une grande maîtrise, de mon point de vue, c’est un chef-d’œuvre.

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Découvrez également les avis de Lune, Cornwall, Dionysos, A.C. de Haenne, Acr0 et Lhisbei.

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Deuxième lecture pour le Challenge Lunes d’encre.

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penny-dreadful

 

Mon avis sur les saisons précédentes est également sur le blog.

 

Attention, ne lisez pas cet avis si vous n’avez pas encore vu la saison 3.

 

Au cours de cette saison, les personnages suivent leur voie séparément, même si leurs destins restent entrelacés. Cela nous donne des récits éclatés dans lesquels nous les voyons se débattre contre leurs pulsions et leurs démons sans le secours des autres. Ils se retrouvent face à eux-mêmes et vient le moment des choix les plus décisifs de leur existence. On ne sait si ce qu’il reste de leur humanité va résister.
Les femmes sont le point fort de cette saison. Elles n’avaient que peu de place dans la première, à part Vanessa, tourmentée par ses démons, et en arrière-plan Brona, mourante, qui cherchait sa respiration dans ce quotidien sordide… Peu à peu, elles prennent le dessus, leurs personnages sont développés. Il est très intéressant de voir leur cheminement vers la liberté. Mais va-t-on les laisser s’affranchir ?
Parmi les nouveaux personnages que nous amène cette saison, j’ai beaucoup aimé celui du docteur Seward, une femme intelligente, déterminée, rationnelle mais pas dénuée de compassion. C’était une merveilleuse idée de faire revenir Patti LuPone sous ces traits. Dans ses deux rôles, elle a beaucoup apporté à la série par sa prestance et son jeu d’actrice.
Penny Dreadful est une de mes séries préférées. Une des rares que j’ai suivies religieusement, c’est-à-dire dès le début de chaque saison. Mon intérêt n’est jamais retombé, fait est assez rare pour être souligné. Je me lasse vite des séries… Or, celle-ci est une vraie merveille. J’aime la grande humanité qui s’en dégage, le sens aigu du détail dont les scénaristes ont fait preuve et la complexité des personnages. Telles des fleurs maladives, ils tentent de s’épanouir dans les ténèbres. Leur nature écorchée parle à ma sensibilité et les thèmes abordés, monstruosité, différence, recherche de soi et de sa propre humanité, me sont chers. Cette série sombre, composée de tableaux vivants, restera profondément gravée dans ma mémoire.
Néanmoins, la troisième saison m’a semblé en-dessous des deux précédentes. Après avoir vu les premiers épisodes, je ne m’en suis pas formalisée outre mesure. La deuxième saison était exceptionnelle (et je pèse mes mots), je savais que la comparaison serait difficile à tenir. Cette nouvelle saison paraissait plus brouillonne, tout ou presque était relativement prévisible et l’histoire allait un peu trop vite pour être correctement développée. Je ne comprenais pas pourquoi, après avoir tant laissé traîner certaines intrigues, celles-ci étaient bouclées aussi abruptement. Toutefois, c’était du prévisible logique, dont pardonnable, et puis de nouveaux personnages intéressants sont apparus et certains épisodes se sont révélés passionnants. J’ai été particulièrement fascinée par l’incursion dans le passé de Vanessa et de John Clare.
Entendons-nous bien, même si j’ai trouvé que les scénaristes avaient eu plus d’une fois recours à la facilité, j’ai regardé les sept premiers épisodes avec une fébrilité avide. Malgré les défauts que j’ai relevés, j’ai aimé cette saison. Cependant, mon indulgence était inféodée au fait que je pensais qu’il y aurait une suite. Je restais confiante parce que je me disais que ces intrigues qui se délitaient trouveraient un écho plus tard et rebondiraient, comme cela était déjà arrivé.
Puis vint le final… Et nous avons appris que Penny Dreadful ne serait pas renouvelée, mais qu’il avait toujours été prévu que la série se déroule en trois saisons. Je n’avais pas encore vu ces deux derniers épisodes, cependant la déception s’est faite plus prégnante. On ne traite pas de cette façon une série dont on connaît par avance la durée de vie. Ils ont délibérément choisi de clore certaines intrigues à la va-vite, elles ne pourraient pas se répercuter sur une prochaine saison pour être étoffées. Ils ont créé de nouveaux personnages dont le potentiel serait mort-né…
Ce n’est pas tant la fin désabusée qui m’a déplu – elle est on ne peut plus logique, même si elle manque un peu de finesse – mais l’aspect bâclé qui nimbe cette saison. Durant les deux premières, je n’avais jamais trouvé le scénario prévisible, jamais le traitement réservé aux personnages ne m’avait semblé expéditif. Penny Dreadful m’avait habituée à plus de minutie et de profondeur.
Malgré tout, cela reste une série à voir, une œuvre d’art à la grâce fragile. Le jeu d’Eva Green y est grandiose, mais les autres membres du casting ne sont pas en reste. Je suis certaine que Penny Dreadful restera une de mes séries préférées, une de celles que je revois de temps en temps avec toujours autant de plaisir.

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Une BD de Joris Chamblain et Aurelie Neyret, publiée chez Soleil.

 

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Présentation de l’éditeur :

Cerise est une petite fille âgée de 11 ans, qui vit seule avec sa mère. Elle rêve de devenir romancière, et a même déjà commencé à écrire ses carnets ! Son sujet favori : les gens, et plus particulièrement, les adultes. Ils sont si compliqués qu’elle souhaiterait mieux les comprendre. Elle adore les observer pour tenter de deviner quels secrets ils dissimulent au fond d’eux. Prenez Michel… Tous les dimanches, ce vieil homme s’engouffre dans la forêt avec de gros pots de peinture à la main. Qu’y fait-il donc toute la journée ? Repeint-il une vieille maison ? Décore-t-il des arbres ? Et pourquoi a-t-il l’air si triste quand il rentre le soir ? Suivez Cerise, pas à pas, dans sa première enquête qui vous mènera au cœur de la forêt, à la découverte d’un lieu fabuleux !…

Comme le titre l’indique, cette BD nous présente les carnets d’une petite fille, aussi vive qu’adorable, qui bien entendu se prénomme Cerise. Celle-ci veut devenir romancière et elle aime bien observer les gens, mener de petites enquêtes sur eux. Dans ses carnets, qu’elle commence tout juste, elle prend des notes pour s’exercer à son futur métier. Ce tome sert également à présenter son entourage, plein de personnages qu’on a vite envie de mieux connaître.
Cerise est intelligente et sensible, même si elle se montre aussi maladroite avec sa maman. Et le moins qu’on puisse dire est qu’elle a aussi beaucoup d’imagination… Sa curiosité naïve et bienveillante est rafraichissante. Elle s’intéresse à un vieux monsieur, qu’elle voit toutes les semaines transporter des pots de peinture en forêt. Elle va percer cette énigme à jour et c’est vraiment une très jolie histoire.
La présentation de l’album m’a beaucoup plu. C’est très régressif, dans le bon sens du terme, avec les chutes de crayons dans les marges, les petits dessins, les photos épinglées sur des feuilles de classeur, des images de ce que Cerise aurait scotché, des taches d’encre… Un vrai carnet de petite fille. Rien n’est laissé au hasard, on a même droit à l’écriture qui change de texture, comme si la petite avait changé de stylo. C’est tout une ambiance !
Cependant, tout n’est pas extrait du journal intime de Cerise et cela donne lieu à de très belles balades en forêt, puis plus tard dans l’endroit magnifique que l’enfant va découvrir. Les illustrations sont parfaites. Il s’en dégage à la fois de la douceur et de la joie de vivre, tout cela vivifié par les couleurs acidulées de l’enfance.
Ce premier tome m’a littéralement enchantée ! C’est une petite merveille et je vais m’empresser de découvrir la suite. Si vous hésitez à commencer une série de plus, sachez néanmoins qu’il peut se lire indépendamment, il a une vraie fin et le récit, bien que court, est suffisamment développé. On passe un excellent moment de lecture avec Cerise et ses amis.
C’est une BD géniale et attendrissante, pleine de poésie et de douceur, sans niaiserie. Si un jour vous avez besoin de réconfort, lisez Les Carnets de Cerise.

 

Découvrez également l’avis d’Acr0 sur ce premier tome.

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Une bande-dessinée de Nick Abadzis, publiée chez Dargaud.

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Présentation de l’éditeur :
La véritable et poignante histoire du premier être vivant envoyé dans l’espace : la chienne Laïka. Une saga scientifique et historique qui révèle plusieurs histoires : celle de l’ingénieur en chef du programme soviétique, la course à l’Espace entre les USA et l’URSS, et celle de Laïka, bien sûr, chien errant qui n’échappa à l’euthanasie que pour devenir un cobaye sacrifié sur l’autel de la réussite humaine et, au final, un symbole de progrès. Une histoire racontée avec une immense finesse et la plus grande précision historique.

Cette bande-dessinée est basée sur des événements réels.
Peut-être avez-vous déjà entendu parler de Laïka, en tout cas je l’espère. Cette petite chienne fut le premier être vivant envoyé dans l’espace.
Dans les années cinquante, L’U.R.S.S. et les U.S.A. jouaient à qui pisserait le plus loin. La conquête spatiale faisait rêver, c’était une façon comme une autre d’entretenir leur rivalité. Tout moyen était bon à prendre pour prouver sa supériorité. C’est dans ce contexte délicieux qu’en 1957, un mois après le lancement du satellite artificiel Spoutnik, les soviétiques ont envoyé Laïka, une petite chienne de trois ans, à bord de Spoutnik II, sans se soucier de n’avoir aucun moyen de la ramener en vie.
Elle avait été trouvée errante dans les rues de Moscou. Rien ne la prédisposait à ce destin aussi grandiose que tragique et vide de sens. Cette bande-dessinée raconte son histoire, lui inventant un début de vie loin d’être rose, mais tâche de lui donner le plus de réalisme possible et de s’appuyer sur des faits pour la suite. On montre même l’entraînement subi par les chiens du programme spatial. Ces pauvres bêtes ont beaucoup supporté… Laïka n’est pas la seule à avoir péri. J’en profite d’ailleurs pour rappeler que trois années sont juste un cinquième de la vie d’un chien, sachant que les petits gabarits, surtout les bâtards, ont même une espérance de vie supérieure à quinze ans. Certes, envoyer à la mort un chien plus âgé n’aurait pas rendu cela moins atroce, mais c’est d’autant plus sordide que cette chienne était à l’orée de sa vie. Aucun animal ne mérite ça et la BD le retranscrit parfaitement, malgré le sentimentalisme romancé des premières pages, quand l’auteur imagine à Laïka un début de vie à propos duquel on ne possède aucun renseignement réel.
Je ne suis pas particulièrement fan du graphisme, mais l’important est de faire davantage connaître le destin de cette petite chienne, victime de la bêtise humaine déguisée en course vers le progrès. En cela, la BD est très réussie. On a envie de d’empêcher l’inéluctable, mais si ce n’est pas la petite Koudriavka, ce sera une autre chienne… On ressent l’horrible attente qui pèse sur l’animal et certains de ses soigneurs, le climat lourd de méfiance et de menaces d’une époque où la moindre opposition pouvait vous valoir le goulag… C’est très triste, évidemment, mais c’est aussi un bel hommage. Parce que je savais à quoi m’attendre, j’ai beaucoup pleuré en lisant… La moindre des choses que nous pouvons faire pour Koudriavka – Laïka – est de ne jamais l’oublier.
Un chien offre une confiance sans réserve à ceux qui le soignent… Ce sont des animaux naturellement bienveillants et prêts à supporter sans broncher les situations les plus extrêmes pour plaire à leur maître. C’est d’autant plus vrai pour ceux qui ont été recueillis et sont de fait très reconnaissants envers leurs sauveurs. Imaginez la détresse de ce pauvre animal, enfermé dans cet engin, seul, dans le bruit, la chaleur, le chaos… Elle a agonisé entre cinq et sept heures, espérant probablement jusqu’à sa dernière seconde de conscience qu’on vienne la chercher. Longtemps, on a raconté que Laïka était morte après avoir consommé de la nourriture empoisonnée, laissée à sa disposition comme un acte d’humanité… C’est faux, la chaleur l’a tuée. Et ce sacrifice n’aura quasiment rien apporté à la science, il a juste nourri l’ego d’un gouvernement.
Ce n’est pas à l’école ni en regardant un reportage ou en lisant une revue que j’ai appris l’histoire de Laïka. J’étais adolescente, j’écoutais la radio, et j’ai entendu la chanson de Mecano qui lui est dédiée… Je ne vous cache pas que je trouve aberrant d’avoir dû l’apprendre par ce biais.
Des années plus tard, le destin tragique de Laïka me bouleverse toujours autant. C’est pour cela que j’ai voulu lire et chroniquer cette bande-dessinée (même si j’admets n’avoir pas beaucoup parlé du livre lui-même). C’est ma contribution, si humble soit-elle, à faire connaître son histoire et à faire en sorte qu’on ne l’oublie jamais. Il est si facile d’effacer ce qui nous dérange…

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Laika

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Un roman d’Anthelme Hauchecorne, premier tome du diptyque Le Nibelung, publié aux éditions du Chat Noir.

Les illustrations intérieures sont de Mathieu Coudray et Loïc Canavaggia.

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Présentation de l’éditeur :

Ludwig grandit à Rabenheim, un petit bourg en apparence banal.
Claquemuré dans sa chambre, il s’adonne au spiritisme. À l’aide d’une radio cabossée, il lance des appels vers l’au-delà, en vue de contacter son père disparu.
Jusqu’à présent, nul ne lui a répondu…
Avant ce curieux jour d’octobre.
Hasard ? Coïncidence ? La veille de la Toussaint, une inquiétante fête foraine s’installe en ville. Ses propriétaires, Alberich, le nabot bavard, et Fritz Frost, le géant gelé, en savent long au sujet du garçon. Des épreuves attendent Ludwig. Elles seront le prix à payer pour découvrir l’héritage de son père.
À la lisière du monde des esprits, l’adolescent hésite…
Saura-t-il percer les mystères de l’Abracadabrantesque Carnaval ?

Le Carnaval aux corbeaux a été un franc coup de cœur. J’ai participé à la bêta lecture en juin dernier et en parcourant cette histoire j’avais l’impression d’être en octobre malgré la chaleur, tant l’atmosphère mise en place par Anthelme Hauchecorne et les nombreuses illustrations qui parsèment l’ouvrage sont évocatrices.
Ce roman original, tissé sur un canevas de mythes, légendes et superstitions, joue sur ces petites frayeurs de l’enfance qui nous poursuivent, nous hantant en marge de notre conscience même à l’âge adulte. Il n’éveille pas l’horreur dans l’esprit du lecteur, mais cet effroi glaçant et délicieux qui picote la pulpe des doigts au moment de tourner les pages.
Cette lecture est idéale pour l’époque de la Toussaint, d’une part car c’est à cette période que l’intrigue se déroule, d’autre part parce que l’ambiance de ces mois sombres d’automne en est rendue à la perfection. Qui ne se souvient pas de ces vacances de fin d’octobre brumeuses, quand le voile se fait léger entre la réalité pragmatique et la magie que l’on aimerait voir se nicher dans les ombres ? Le Carnaval aux corbeaux m’a ramenée en enfance, quand je lisais des récits juste suffisamment glaçants pour apprécier d’être chez moi, en sécurité, et qu’il pleuvait au dehors.
Les motifs disséminés par l’auteur dans son histoire parleront à chacun car puisés dans notre imaginaire collectif. Ce roman traite du difficile passage de l’enfance à l’âge adulte, quand les rêves et les croyances deviennent plus handicapants et monstrueux que rassurants. Si la réalité déchiquète nos espoirs, n’est-ce pas pour nous protéger de cette magie que l’on recherche et qui pourrait se révéler plus dangereuse qu’escompté ? Les enfants retiennent plus facilement les fins heureuses que le prix à payer pour un sortilège… Ludwig et Gabriel, les héros pris dans les rets de cet étrange Carnaval, vont l’apprendre à leurs dépens.
Ce récit complexe, rendu à la fois tortueux et prenant grâce à de nombreuses intrigues enchevêtrées, plaira autant aux jeunes, à qui il est destiné à la base, qu’aux adultes. Les premiers apprécieront sans aucun doute de ne pas être pris pour des imbéciles, les seconds, quant à eux, n’ont pas à craindre de s’ennuyer en suivant les aventures de protagonistes adolescents. Quant aux habitués de SFFFH, qu’ils se rassurent, même s’ils goûteront les nombreuses références jalonnant le récit, ils ne manqueront pas de le trouver très original.
J’ai beaucoup aimé les références, qu’il s’agisse de celles, évidentes, à certains auteurs que j’adore et qui se glissent dans les noms des personnages ou les autres, plus taquines, dissimulées. Si vous avez lu et apprécié La Foire des ténèbres de Ray Bradbury, vous retrouverez un peu de cet esprit, toutefois en plus ludique, plus humain et peut-être même plus profond. Dans le fond, la façon de traiter le sujet est davantage proche de Gaiman que de Bradbury, ce qui n’est pas un mal. Cependant ce Carnaval a bien sa propre identité. L’auteur a créé un background riche et même si ce tome pourrait se suffire à lui-même, l’envie d’explorer cet univers demeure forte une fois la dernière page tournée.
On ne s’ennuie jamais au cours de cette lecture car rien n’est évident ou convenu. Les personnages sont étoffés, nuancés, j’ai pris plaisir à découvrir leur histoire petit à petit. Bien sûr on a forcément des préférences et il est délectable d’en détester certains, cependant même les plus caricaturaux ont leurs secrets. Il est impossible de se fier à qui que ce soit et les rebondissements sont nombreux. Les chapitres fragmentés, découpés selon les personnages que l’on va suivre, permettent de s’intéresser à chacun, tout en ménageant le suspense.
Le Carnaval aux corbeaux est un excellent roman que je vous encourage vivement à découvrir, que vous ayez ou non une âme d’octobre.

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